Interprétation des radios en urgences : l’IA peut-elle suffire ? Débat et controverse

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Report de la session : Peut-on limiter l’interprétation des radiographies des urgences à celles jugées douteuses ou pathologiques par l’IA ? Modérateur : Kathia CHAUMOITRE Intervenants : Guillaume HERPE et Marie Pauline TALABARD
Texte

Guillaume HERPE, radiologue au CHU de Poitiers, ancien conseiller médical INCEPTO pendant 3 ans.

Constat : 75% des CHU n’interprètent plus les radiographies des urgences. Historiquement, les algorithmes étaient entrainés pour une tâche spécifique : un examen classé normal par l’IA ne suffit pas, car cela n’écarte pas la présence d’une autre anomalie significative. Les nouveaux outils intègrent maintenant une fonction de triage avec radio normale ou non, et étude plus complexe avec large spectre d’anomalies radiographiques.

Les données CHU de Poitiers montrent que la majorité des radiographies standards sont normales (60%°. La discordance avec l’algorithme est rare (5%). Les solutions utilisées d’IA sont efficaces. La question du temps radiologue est primordiale, avec une supervision humaine par l’urgentiste (qui est aujourd’hui déjà le 1er lecteur). Les algorithmes actuels gardent une très bonne VPN. Les données permettraient une interprétation déléguée : le 1er lecteur clinicien suffirait. Condition : IA efficace, de confiance en maintenant un lecteur humain avec supervision.

Marie Pauline TALABARD, radiologue à l’hôpital Cochin à Paris et ingénieur de formation. Expertise en codage.

Constat : les erreurs de l’IA en pratique clinique sont fréquentes (lors de la session sont présentés des dossiers d’erreurs d’une garde de la semaine dernière, notamment le cas clinique présentée ci-dessous).

L’imagerie normale sert dans notre apprentissage. Il ne faut pas se former en regardant uniquement des radiographies pathologiques. Il faut donc regarder le normal avant de regarder le pathologique. Vision de l’IA : copilote, aide de qualité au quotidien mais avec un regard critique. Une radiographie, quel que soit le résultat, est une information de soin utile.

Kathia CHAUMOITRE (modérateur) : Et la question médico légale dans tout ça ?

Guillaume HERPE : En effet, c’est une problématique essentielle : il faut maintenir une lecture humaine, obligatoire.

Kathia CHAUMOITRE : Les erreurs des radiographies standards ont un rôle important dans les contentieux. Nous ne devons pas autoriser des erreurs de l’IA.

Guillaume HERPE : Oui, en effet. Nénamoins n’oublions pas le biais d’automatisation faible : dans 1 à 2% des cas suivre la prescription erronée de l’IA a des conséquences cliniques significatives. Le gain d’accuracy traditionnel de l’IA s’lélève à 7%, bien supérieur.

Marie Pauline TALABARD : Il y a un risque de perte en expertise de la lecture des radiographies standards.
Guillaume HERPE : Cette question de perte en compétence est déjà présente, car on le rappelle, 75% des CHU ne relisent pas ces radiographies des urgences.

Kathia CHAUMOITRE : On peut faire un parallèle avec la médecine biologique avec validation de résultats automatisés sans vérification systématique.

Guillaume HERPE : L’idéal serait de ne pas reproduire ce modèle en radiologie. Il faut conserver la supervision humaine. Elle est indispensable.

Kathia CHAUMOITRE : Que pensez-vous du risque que l’urgentiste fasse trop confiance à l’IA ?

Guillaume HERPE : Pour limiter ce risque, besoin d’utilisation d’un algorithme entrainé sur le normal : utile et permettrait de ne plus interpréter les flux de radiographie normale.

Marie Pauline TALABARD : Les performances de l’IA ne sont pas encore assez bonnes pour se passer de l’avis du médecin radiologue. Il faut avoir un résonnement global et prendre en compte les données cliniques.

Intervention du public : 
Si cela permet de gagner du temps et de fluidifier le workflow, pourquoi pas faire confiance à l’IA.

Mot de la fin :

Les 2 intervenants s’entendent sur un point : implémenter la supervision par les logiciels d’IA dans la formation des radiologues.

Une idée pour régler ce problème de formation à la radiographies standards pourrait être d’intégrer une formation par l’IA afin d’optimiser la formation spécialisée. L’idée : s’orienter vers une utilisation didactique avec adaptation au niveau de l’interne.

 

CT

Cas clinique : fractures du corps de T12 et L2 manquée par l’intelligence artificielle, confirmée par le TDM. Seule la fracture du corps de L1 est diagnostiquée par IA. Cas présenté par le Dr TALAMARD.