Éthique en radio gériatrie : des questionnements pas anodins

La séance se pose comme objectifs de mieux comprendre la radiogériatrie, d’appréhender les enjeux liés au patient âgé et de réfléchir aux notions de pertinence et de justesse du soin. Il faut donc commencer par clarifier ce qu’on entend par éthique.
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La séance de radiogériatrie animée par Viviane Perrier, manipulatrice en radiologie interventionnelle et doctorante en philosophie, Evelyne Meyblum, radiologue et par Paul-Loup Weil-Dubuc, philosophe, membre de l’Espace Éthique de France et moderée par Catherine Adamsbaum.

Texte

Celle-ci ne décrit pas des faits, mais interroge le bien et le mal à travers des jugements évaluatifs, fondés sur des normes (règles explicites ou implicites) et des valeurs (raisons d’agir qui donnent sens à nos vies). Les valeurs éthiques, telles que l’autonomie ou la dignité, se distinguent par leur portée universelle.

L’éthique s’oppose donc à la morale : cet ensemble de règles préexistantes propose des réponses toutes faites. L’éthique, au contraire, surgit lorsque ces repères sont insuffisants ou contradictoires, dans des situations de trouble. La morale propose des réponses avant que la situation de pose alors que l’éthique raisonne sur ce que doit être fait sur la situation en question
Tout décision à prendre fait expérimenter l’éthique, qui se trouve donc confronté aux pluralismes des visions du bien, qui oblige au débat dans nos sociétés, et à la temporalité de crise, où il faut agir vite malgré l’incertitude.

Ainsi, l’éthique apparaît comme une démarche collective, une réflexion porté sur normes et valeurs dans un contexte de pluralisme et de crise nécessaire pour donner sens aux décisions médicales, notamment en contexte gériatrique.
Mais est ce que déjà on est d’accord sur la définition même de la « personne âgée » ?  Il n’existe en fait pas de seuil unique : certains dispositifs sociaux parlent de 60 ans, les statistiques de 65 ans, l’oncogériatrie intervient plutôt à partir de 75 ans, et les services hospitaliers accueillent souvent des patients de plus de 85 ans. Ce groupe est extrêmement hétérogène, certains octogénaires étant en pleine forme tandis que des quinquagénaires sont déjà fragiles. La tendance démographique est claire : la population des plus de 75 ans est en forte augmentation et représentera bientôt un adulte sur cinq.

Les spécificités cliniques des personnes âgées compliquent les décisions en imagerie. Les symptômes sont souvent atypiques, les décompensations rapides, et les patients polypathologiques. Face à cela, l’éthique aide à guider les choix : jusqu’où aller dans les explorations radiologiques ? Une phrase entendue dans un service, « Pourquoi embêter cette mamie ? », illustre ce dilemme. Derrière cette réaction se cachent des stéréotypes (âgisme, infantilisation, paternalisme), mais aussi le malaise des soignants confrontés au risque de maltraitance involontaire.

La réflexion s’appuie sur les grands principes éthiques : autonomie, bienfaisance, non-malfaisance, justice, auxquels s’ajoutent dignité, responsabilité et proportionnalité. Elle distingue les normes de comportement (réactions spontanées, instinctives) des normes d’action (objectifs réfléchis de soin), souvent en décalage dans ces situations.

Enfin, les notions de pertinence et de justesse sont centrales. L’imagerie doit être évaluée non seulement selon le bénéfice médical, mais aussi en fonction de l’impact sur la qualité de vie, la volonté du patient et l’équité dans l’allocation des ressources. Parfois, un examen peut être « compassionnel » : non pas pour guérir, mais pour accompagner dignement.