Pourquoi une échographie musculosquelettique à Roland-Garros ?

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Depuis bientôt 25 ans, les joueurs participants au tournoi de tennis de Roland-Garros bénéficient sur place d’une surveillance échographique. Ce qui était une innovation est devenu progressivement la règle pour toutes les grandes compétitions sportives car les avantages de cette « échographie sur place » se sont rapidement imposés.

Les joueurs sont confrontés à deux problèmes durant le tournoi : une lésion aiguë pouvant interrompre leur participation et des douleurs chroniques pour lesquelles ils souhaitent une prise en charge pour optimiser leurs performances. 
Dans les deux cas de figure, l’échographie MSK permet, en complément de l’examen clinique, de préciser le diagnostic et ainsi d’orienter le traitement et de faciliter la décision de la poursuite ou de l’arrêt du tournoi.
L’avantage de bénéficier de cet examen sur place est très apprécié par le joueur car cela permet de raccourcir les délais et de lui éviter une sortie, parfois médiatisée, de l’enceinte du tournoi. Par contre, point négatif important, il ne faut pas oublier qu’une lésion musculaire ne doit jamais être échographiée en urgence !! C’est source d’erreurs majeures mais c’est parfois difficile de le faire comprendre au joueur (et à son entourage !)

A Roland-Garros, contrairement à de nombreuses autres manifestations sportives, cette échographie est toujours réalisée par des radiologues ostéo-articulaires et elle est le plus souvent effectuée en présence du médecin du sport ayant fait l’examen clinique ce qui permet de répondre précisément à ses questions. Ces conditions permettent des examens de grande qualité dont les performances diagnostiques sont appréciées.
A cette efficacité et cette qualité s’ajoute un point important pour les joueurs : la gratuité car, le prix important des examens dans certains pays peut, hormis pour les cinquante premiers mondiaux, leur poser des problèmes financiers !!
Ces éléments ont certainement contribué au fait que le service médical de Roland-Garros a été classé numéro 1 mondial par les instances de l’ATP et de la WTA.

9 radiologues se partagent différentes plages horaires, bien définies, couvrant les après-midis et les soirées ce qui permet de répondre aux demandes, le plus souvent le jour même. Nous sommes rétribués par la fédération française.
Entre 120 et 150 échographies sont effectuées chaque année durant ces trois semaines (qualification+ tableau final).

Les pathologies rencontrées sont très variées : lésions musculaires, articulaires, tendineuses….mais deux pathologies sont plus spécifiques à la pratique de ce sport de raquette pratiqué à un haut niveau. Ce sont : les lésions du tendon de l’extenseur ulnaire du carpe (ECU) et celles du muscle droit de l’abdomen. 

L’atteinte de l’ECU résulte de contraintes favorisées par le lift et certaine position de la main sur le manche de la raquette (prise Western par exemple). La lésion atteint le poignet dominant lors du coup droit et le non-dominant en cas de revers à deux mains. En supination, le tendon est soumis à une force de latéralisation qui distend le rétinaculum le maintenant dans sa coulisse ; il en résulte soit une désinsertion de l’attache du rétinaculum imposant l’arrêt du tournoi soit une lésion chronique : tendinopathie, subluxation, pathologie du rétinaculum… (Fig. 1). La majorité des joueurs professionnels ont été, à une période de leur carrière, « empoisonné « par cet ECU !!!
La résolution spatiale et la spécificité dynamique de l’échographie sont des outils indispensables à la détection mais surtout à la gradation de cette pathologie.

Le muscle droit de l’abdomen (anciennement appelé : grand droit) est sollicité de manière très importante lors du service et du smash. Une conjonction de contraction durant une phase d’extension maximale en sont les facteurs pathogènes. C’est le côté non dominant qui est toujours affecté (atteinte du droit de l’abdomen gauche chez un patient droitier). 
Comme les autres muscles des parois, et contrairement aux muscles des membres inférieurs, le droit de l’abdomen ne présente pas de squelette conjonctif. De ce fait, ses lésions peuvent être situées au sein même du muscle (et non au niveau conjonctif comme pour les muscles ischiojambiers par exemple). Son analyse étant gênée en IRM par les mouvements respiratoires, une échographie correctement réalisée, faisant appel aux épreuves de contraction et au Doppler, est un élément particulièrement important de la détection et de la gradation de ses lésions (Fig. 2). 

Tous ces éléments ont fait en sorte qu’une surveillance médicale à Roland-Garros ne se conçoit plus sans l’aide, sur place, d’une échographie performante.

FIG1
Fig 2

Légendes des figures

1 : Désinsertion aiguë de l’attache du rétinaculum propre du tendon de l’ECU 
2 : Lésion de grade 3 M du muscle droit de l’abdomen gauche chez un tennisman droitier