TEP-IRM dans les démences : un outil clé pour affiner le diagnostic chez le sujet âgé
L’imagerie cérébrale occupe une place croissante dans le diagnostic des troubles neurocognitifs, en particulier chez le sujet âgé. Elle ne se limite plus à un rôle d’exclusion de causes secondaires : les biomarqueurs d’imagerie commencent à être intégrés dans les critères diagnostiques, notamment dans la maladie d’Alzheimer (MA) où l’imagerie amyloïde joue un rôle central. Dans ce contexte, la TEP-IRM offre une solution intégrée, performante et adaptée à cette population fragile.

Chez les patients âgés présentant des troubles cognitifs, le diagnostic différentiel des démences peut s’avérer complexe, en raison de la fréquence des formes mixtes, de la présence de comorbidités et d’une présentation clinique souvent peu spécifique. L’imagerie, couplant des approches structurales et fonctionnelles, permet d’orienter avec plus de précision vers une étiologie. La TEP-IRM constitue dans ce cadre un outil particulièrement adapté, en combinant en une seule session les données métaboliques (TEP) et morphologiques (IRM).
L’IRM structurelle permet d’exclure des causes secondaires, d’objectiver une atrophie hippocampique, de caractériser les lésions vasculaires et de rechercher des microhémorragies. La TEP au FDG détecte précocement des anomalies du métabolisme cérébral, souvent avant l’apparition de signes structuraux.
Elle met en évidence des hypométabolismes topographiquement spécifiques : temporo-pariétaux dans la MA, frontaux et temporaux dans les démences frontotemporales (DFT), occipitaux dans la démence à corps de Lewy (DLB), ou plus localisés dans certaines aphasies primaires progressives.
La TEP-IRM combine ces deux modalités avec un alignement spatial parfait, ce qui améliore la détection de lésions discrètes dans de petites structures comme les sous-champs hippocampiques ou les corps mamillaires. En un seul examen, elle permet une lecture conjointe et unifiée des données, renforçant la confiance diagnostique du radiologue. Pour le patient âgé, cela signifie aussi moins de déplacements, moins de stress, et souvent une sédation évitée.
Elle est particulièrement pertinente dans les situations de comorbidité vasculaire, fréquentes chez le sujet âgé, en permettant de distinguer un hypométabolisme dégénératif d’un effet de diaschisis ou d’une lésion ischémique silencieuse, ainsi que de caractériser la charge lésionnelle d’origine vasculaire.
Un des avantages majeurs de la TEP-IRM réside dans sa capacité à associer de manière simultanée les données métaboliques et anatomiques, tout en permettant l’intégration aisée de biomarqueurs spécifiques.
Au-delà du FDG, l’imagerie amyloïde (avec le 18F-florbetapir, florbetaben ou flutemetamol) est désormais reconnue dans les critères internationaux pour le diagnostic de la MA. Si la détection de dépôts amyloïdes possède une bonne sensibilité, sa valeur prédictive négative est particulièrement utile : une TEP amyloïde négative permet d’écarter avec une grande fiabilité le diagnostic de MA, même en cas de doute clinique. En TEP-IRM, ces images peuvent être interprétées en regard immédiat des données anatomiques, facilitant l’analyse des cas mixtes ou atypiques.

TEP-IRM amyloïde positive chez un patient présentant un trouble cognitif léger.
La fusion des données TEP et IRM permet d’interpréter la distribution des dépôts amyloïdes en tenant compte de l’atrophie corticale sous-jacente et du contexte anatomique global, renforçant ainsi la valeur diagnostique de l’examen.
Des études ont montré que la TEP-IRM amyloïde modifiait le diagnostic dans plus de 60 % des cas, et avait un impact concret sur la prise en charge dans plus de 80 %. Elle s’impose donc comme un outil central dans les centres mémoire, notamment pour orienter vers ou contre l’instauration de traitements ciblant la cascade amyloïde.
La TEP-IRM peut également intégrer d’autres traceurs : dopaminergiques (DOPA, FP-CIT), utiles dans le diagnostic différentiel entre MA et DLB, ou Tau (encore en cours de validation clinique), apportant des éléments déterminants dans les tableaux de type PSP ou démence corticobasale, ainsi que des fixations spécifiques dans la MA.
L’ajout de séquences avancées IRM (perfusion ASL, connectivité fonctionnelle, volumétrie hippocampique automatique) renforce encore l’apport de l’examen. La concordance démontrée entre anomalies de perfusion et hypométabolisme au FDG dans la MA permet de proposer des alternatives IRM dans les contextes où la TEP n’est pas accessible. Néanmoins, la TEP-IRM reste plus performante pour les formes atypiques ou à début précoce.
Enfin, l’approche multiparamétrique de la TEP-IRM, couplée à l’intelligence artificielle et aux modèles de classification, ouvre des perspectives en médecine personnalisée, avec des modèles de prédiction du risque de conversion vers la MA chez les patients atteints de MCI.
Conclusion
La TEP-IRM représente un outil d’intérêt pour le diagnostic des démences du sujet âgé. Elle offre une approche globale et synchronisée, réduisant le nombre d’examens, tout en améliorant la précision du diagnostic et le confort du patient.
Auteur :
Pr Nadya Pyatigorskaya
Service de Neuroradiologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, APHP Sorbonne Université, Paris
Institut du Cerveau (ICM), Sorbonne Université