Le radiologue devant la justice : panic or not panic ?

Cette session comportait 3 présentations permettant un éclaircissement sur les situations où les médecins, notamment radiologues, sont mis en cause judiciairement, en prenant connaissance des branches du système judiciaire et des différents acteurs du cadre expertal, pour finir sur les recommandations selon un expert radiologue.
Texte
  1. Concernant les acteurs de l’expertise que le radiologue doit connaître.

Pour rappel, l’organisation système judiciaire se divise en 2 grandes parties. L’ordre administratif d'une part, où seront impliqués le conseil d'état et le tribunal administratif, et l'ordre judiciaire (civil ou pénal) d'autre part, où seront impliqués les cours de cassation et les tribunaux en découlant.

Les différents acteurs dans le cadre des expertises sont :

    • Les experts : dont la mission est de donner un avis sur des pints techniques précis, designés par le juge ou par les parties au procès, ayant une obligation de moyens et non de résultats.
    • Les magistrats : juges, procureurs et substituts
    • Le juge d'instruction.
    • Le procureur de la république et son substitut.
    • Les magistrats administratifs : juges chargés des litiges entre citoyens et administration.

 

Dans le cadre de la condamnation civile, selon les chiffres de la MACSF entre 2014 et 2023, on observe une légère diminution taux de saisie mais une augmentation de la condamnation (estimée à 70%). Les 4 spécialités les plus concernées par les déclarations sont par ordre décroissant : la médecine générale, la chirurgie orthopédique, l’ophtalmologie, l’anesthésie-réanimation.

 

Pour les radiologues plus précisément, les 3 principales procédures recensées (MACSF 2023) sont par ordre décroissant : CCI, réclamation amiable, procédure civile. Ce qui est reproché aux radiologues : la réalisation d'un examen non systématique, l'absence de mention dans le compte rendu d'un organe non observé à l'échographie.

Les patients sont donc de plus en plus dirigés vers la CCI (commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux), plutôt que la procédure judiciaire. Elle concerne les accidents médicaux, les affections iatrogènes, une affection due à un médicament ou un traitement, une infection nosocomiale, et selon la gravité du préjudice la procédure sera la conciliation ou le règlement à l'amiable.

 

De plus en plus de questions sont soulevées par l’IA dans nos pratiques, notamment ; si l'erreur n'est pas vue qui est responsable ? La société qui fournit le logiciel ou le radiologue ? La CNIL commence à fournir des réponses avec l'entrée en vigueur du règlement européen sur l’IA.

 

En termes de conservation des images on retiendra : 20 ans après le dernier passage en principe, et délai suspendu durant toute la procédure en cas de procédure judiciaire.

 

 

  1. Types d'expertises incriminant ou impliquant les radiologues

Une citation de Pierre Lucas permet une entrée en la matière : “expertiser c'est étudier, comprendre, puis décrire pour faire comprendre”.

Les données techniques vont être utilisées par des magistrats, on doit ainsi être clair dans nos explications pour que le monde des magistrats comprenne.

Parmi les différents types d'expertises, les deux impliquants des experts à proprement parler sont à la demande d'une juridiction (pénale, civile, administrative) et la CCI, ceux-ci évaluant un dommage ou accident médical.

 

Un expert judiciaire est un technicien investi d'une mission par un juge, il doit suivre des règles de déroulement de procédure, est en relation avec les 2 parties contradictoires, afin de donner une réponse technique permettant d'éclairer le magistrat.

 

La radiologue peut être soit expert (médecin conseil) soit mis en cause.

Il existe peu d'experts dans chaque spécialité, ceux-ci étant notés dans une liste nationale dressée par le bureau de la cour de cassation.

 

Le raisonnement médico-légal en expertise lors d'un accident médical a deux points majeurs que sont le dossier médical et l’analyse médico-légale, menant à 4 possibilités :

  • Absence d'accident retenu
  • Accident médical non fautif : peu fréquent, CCI, fonction d'un seuil
  • Infection liée aux soins
  • Faute (perte chance) : pourcentage de perte à déterminer (par ex: quelle perte de chance de déceler un cancer 6 mois plus tard)

Les séquelles sont considérées imputables pour les 3 dernières.

 

Si l’expertise concerne un évènement traumatique, le CMI et le dossier médical permettent un bilan lésionnel puis séquellaire. Les lésions et séquelles pouvant être esthétiques, une réopération, professionnelles, un besoin d’aide humaine…

Il faut ainsi être aguerri sur :

  • L’incidence professionnelle du patient : l’assureur doit prendre en charge salaire et retraites non perçus
  • L’aide humaine : plus le patient est jeune et plus il nécessite d'aide ; plus de coûts

 

Pour conclure cette présentation :

  • Les experts ont des compétences en imagerie, médico-legales, et en termes de réparation du dommage corporel
  • Le radiologue ne doit pas vivre une mise en cause judiciaire comme un drame car c'est l'occasion de donner des explications et faire comprendre à l'expert /à la victime ce qu'il s'est passé
  • Il est nécessaire de se faire accompagner, par un médecin conseil de l'ordre, et un avocat (ce dernier nous représentant)

 

  1. Si j'étais mis en cause, voilà ce que je ferai : Point de vue d'un jeune expert

On observe une augmentation des examens radiologiques par peur de la justice, mais il faut continuer de faire de la bonne médecine.

Les procédures amiables sont gérées via la CCI tandis que les procédures contentieuses sont gérées via le tribunal administratif (litige entre citoyen et hôpital) ou le tribunal judiciaire/civil/pénal (litige entre 2 personnes, notamment dans le privé)

Le patient choisit la procédure ; civile afin d'obtenir une indemnisation, ou pénale afin de sanctionner le médecin.

 

Dans le cadre d’un radiologue hospitalier, l’hôpital est responsable de ses praticiens au civil, alors qu’au pénal la radiologie peut être en cause si la faute est détachable du service (vol, viol, alcool...), mais ce cas est rarissime, la faute étant en général considérée comme celle de l'hôpital. Ainsi le radiologue ne risque rien.

Dans le cadre du secteur privé, le radiologue salarié d'un établissement privé est protégé par celui-ci, et le radiologue libéral a une obligation d'assurance. Ainsi en libéral ou privé, la responsabilité est personnelle mais le radiologue est assuré donc ne risque presque rien.

 

Lors d'un accident médical fautif ou non fautif, il faut se placer dans la situation de l'époque.

Un examen fautif implique une perte de chance, et la faute se définit par référence aux normes de l'art et aux données acquises de la science.

En radiologie, il s'agit en général d'une faute de diagnostic. La question à se poser est : est-ce qu'un médecin normalement diligent placé dans les mêmes conditions avec les mêmes informations aurait fait différemment ? Si oui, c'est une erreur, si non, c'est une faute.

En radiologie interventionnelle, la maladresse est une faute. Elle est définie comme la lésion d'un organe ou tissu non concerné par le site opératoire.

 

L’information au patient est primordiale. Dans la responsabilité pour faute c'est à la victime de prouver qu'il y a une faute, alors que dans le défaut d'information c'est au médecin de prouver que l'information a été délivrée.

Pour les textes de loi, ce qui compte c'est un entretien individuel avec le patient, avec explications de tous les risques même rares.

Le défaut d'information peut aboutir à une perte de chance car le patient aurait pu se soustraire à l'intervention et ses risques s'il avait été bien informé.

Texte

Pour finir, les recommandations pour éviter d'être mis en cause : ne pas penser aux juges ou aux risques médico-légaux, faire de la bonne médecine, informer et prendre soin du patient.

A défaut, si on est mis en cause : prévenir l’assureur et l'établissement, rassembler les données du dossier médical, assister à l'expertise accompagné.

 

Dans tous les cas, pas de panique !

pas de panic

"no.panic !"