Les perspectives futures pour l’organisation du dépistage du cancer du sein

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Dépistage du cancer du sein : 20 ans après, nouvel élan, perspectives futures

Stratégie nationale de lutte contre le cancer (INCa 2022) : des progrès pour tous, de l’espoir pour demain, tel en était le titre. Au milieu de la stratégie décennale, où en sommes nous ? Evaluation du dispositif des dépistages organisés (rapport de l’IGAS 2022) : résultats en deçà des attendus, rôle des centres régionaux de coordination des dépistages des cancers (CRCDC), révision du pilotage du programme, changement d’échelle dans les actions « d’Aller vers », investir dans le numérique et la gestion des données, où en sommes nous ?

Texte

Introduction

Le cancer du sein reste le cancer féminin le plus fréquent en terme d’incidence. Dépisté tôt et mieux, c’est un cancer de bon pronostic, dont le taux et de survie et la qualité de vie s’améliorent grâce à la synergie simultanée des avancées de toutes les disciplines : précisions et optimisations diagnostiques, personnalisation et ajustement des traitements médicaux et chirurgicaux. La rénovation du dépistage est une nécessité pour corriger les nombreuses insuffisances connues d’acteurs (trop) imparfaitement coordonnés : insuffisance de participation, atteinte des publics, inefficacité de l’évolution numérique, efficience médicale et contrôle des effets délétères à parfaire, régionalisation insuffisamment aboutie, efficience médico-économique de santé publique à améliorer et à objectiver, déficit de recherche en santé publique.

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Remédier aux maillons faibles du dépistage : 2025 l’année de tous les changements

  • Insuffisance de participation (taux entre 10 et 35 % inférieurs aux 70% espérés) avec 3 grands leviers :

- celui de l’organisation qui a évolué depuis le 1er Janvier 2024 avec la reprise encore bien perfectible des invitations en masse par l’Assurance Maladie (AM),

- celui des actions ciblées « d’Aller vers » des populations éloignées du dépistage avec les CRCDC, les ARS, les CPTPS et MSP : recherche-actions interventionnelles associant les Villes, Journées 3 dépistages ou mammobiles intégrant phoning ciblé de l’AM et villages santé de promotion des dépistages avec les chargés de prévention, partages d’expériences et adaptations aux vulnérabilités territoriales,

- celui la réorganisation interne effective des CRCDC : missions réaffirmées de santé publique, régionalisation de la coordination des actions de prévention pour une professionnalisation reproductible des actions territoriales trop dispersées, inégales et trop peu évaluées, valorisation des actions probantes à destination de l’ensemble des partenaires.

 

  • Insuffisance d’échanges avec le niveau national sur les évolutions des programmes :

- nécessité d’une actualisation plus rapide des recommandations professionnelles par les différentes agences et instituts nationaux trop éloignés des pratiques,

- libérer des dérogations au cadre national et permettre des expérimentations validées par l’ARS.

 

  • Dématérialisation et numérisation globale, évolutions technologiques pour améliorer l’efficience de l’ensemble des processus du dépistage, les chantiers et les leviers sont nombreux :

- Rénovation de la seconde lecture : des appels d’offre sont lancés par les CRCDC pour disposer de solutions ergonomiques et inter-opérationnelles de dématérialisation et de transfert des dossiers de mammographies et de logiciels de gestion inter-opérables de la base des dépistages.

- Dématérialisation permettant l’évaluation des 2èmes lecteurs, la communication entre les 1ers et 2èmes lecteurs, un consensus facilité des discordances avec accès à la tomosynthèse.

- L’intelligence artificielle a mis en évidence les insuffisances de la 2ème lecture, responsables d’un sur-diagnostic potentiel, de taux de rappel et de cancer d’intervalle élevés. La capacité de tri de l’IA offrira l’opportunité de réduire d’au moins moitié la charge de travail de 2ème lecture radiologique et de ne s’intéresser qu’aux mammographies « utiles » à lire, réduisant d’autant le délai de rendu des résultats aux femmes.

- Des scénarii hybrides intégrant les pratiques des 1ers lecteurs (dont la tomosynthèse, outil de détection) et intercalant l’IA entre la 1ère et la 2èmesont à mettre en place pour optimiser la qualité du programme et son efficience. L’IA permettra une personnalisation du suivi pour tout score d’IA élevé au vu de la forte incidence de cancer dans les groupes classés à haut risque par l’IA.

- Nécessité d’investir dans le numérique pour harmoniser les pratiques et réorienter les CRCDC vers les missions pour lesquelles ils ont la plus forte valeur ajoutée : régionalisation et centralisation du data management et du suivi des positives, plate-forme de données pour l’évaluation et la recherche.

- Facilitation du partenariat aves Santé Publique France et l’Observatoire Régional de Santé.

- Interconnexion avec la vague 2 du Ségur numérique qui permettra en 2025 de tirer parti de toutes les potentialités du numérique : interopérabilité de l’espace numérique régional,

réseau de partage d’antériorités d’imagerie médicale entre le PACS de l’établissement producteur et le DMP via la DRIMbox, possibilité d’accéder aux examens d’imagerie via des liens contextuels web pointant vers les examens stockés et leurs compte-rendus, partage d’images entre professionnels de santé (radiologues, spécialistes et prescripteurs) via le DMP et accès patient aux images depuis Mon espace santé (MES). Accès fluide pour les CRCDC au suivi des positifs de tous les dépistages et évaluation facilitée.

 

  • Plan d’action d’amélioration de la qualité et labellisation des CRCDC

Les bénéfices de la modernisation du dépistage, de l’harmonisation des pratiques et des processus sont nombreux pour les femmes :

- organisationnels : accès au dépistage et connaissance des taux d’exclusion, analyses de données sociales territorialisées, délais d’accès aux examens, prise en compte du handicap,  réduction du taux de rappel, réduction du délai de rendu des résultats.

- médicaux : optimisation du dépistage avec effets positifs sur le taux de rappel, le sur-diagnostic, le taux de cancer d’intervalle dont la maitrise est un enjeu majeur du dépistage organisé, centralisation du suivi.