La région Hauts-de-France à l'honneur

À l'occasion des JFR 2023, le président du congrès Marc Zins a suggéré de mettre en lumière la région Hauts-de-France. En préparant cet événement, nous avons eu l'idée de célébrer la mémoire d'Henri Matisse, né le 31 décembre 1869 au Cateau-Cambrésis
matisse portrait

À l'occasion des JFR 2023, le président du congrès Marc Zins a suggéré de mettre en lumière la région Hauts-de-France. En préparant cet événement, nous avons eu l'idée de célébrer la mémoire d'Henri Matisse, né le 31 décembre 1869 au Cateau-Cambrésis dans le Nord, dont le talent en tant que peintre, dessinateur, graveur et sculpteur est mondialement reconnu.

Nous avons eu le privilège de rencontrer Patrice Deparpe, conservateur en chef du musée Matisse, et après avoir discuté des grands thèmes de notre congrès avec lui, il nous a présenté les réflexions suivantes.

Dans le contexte de la mise en avant de la région Hauts-de-France, Matisse ne pouvait être que son ambassadeur.

Par lui, trois axes représentatifs de la région ont été envisagés :
- Le textile
- La représentation du corps
- La maladie

Reprenons-les :

Le textile
Matisse est issu d'une lignée de tisserands établie depuis plus de 300 ans autour du Cateau-Cambrésis. L'influence du textile est prédominante dans son œuvre. Les textiles y sont fréquemment représentés, et il possédait une collection de textiles qu'il utilisait pour habiller ses modèles. Il a confectionné des costumes, notamment pour le ballet « Le chant du Rossignol », et il a lui-même découpé des tissus. Sa maîtrise de la découpe et sa dextérité avec les ciseaux ont rendu possible la création des papiers découpés.
Malgré les critiques de l'époque, cette représentation de textiles provenant de divers pays a affirmé le style « décoratif » de Matisse et l'a amené à revendiquer que « La créativité demande du courage ».

La représentation du corps
La représentation du corps est un thème majeur dans l'œuvre de Matisse, et elle s'avère être un exercice d'interprétation et de création. Matisse ne cherche pas à « faire coïncider le modèle avec une théorie préconçue ». Son objectif n'est pas de le copier, mais de le représenter. Matisse étudie et s'approprie l'image du corps, puis la retranscrit en inventant ses propres symboles, en y transmettant les émotions que lui inspire le modèle. Cet exercice, extrêmement complexe et exigeant, est illustré par la célèbre citation du Maître : « Seul l'artiste dans sa maturité, et non le débutant, peint avec son cœur ».

La maladie
La maladie a été omniprésente dans la vie de Matisse et a joué un rôle déterminant dans son parcours en tant que peintre. Jugé « fragile » pour reprendre l'entreprise familiale de graineterie de son père, le jeune Matisse a hésité entre une carrière de pharmacien et de juriste. Finalement devenu Clerc de Notaire, travaillant à Saint-Quentin, en 1890, il a découvert l'aquarelle pendant une longue hospitalisation, ce qui a été un véritable « coup de foudre » artistique et l'a poussé à abandonner sa carrière antérieure pour devenir peintre.
En 1930, après avoir peint abondamment et souffert d'un bras en mauvais état, son médecin lui a imposé plusieurs mois de repos. Il a entrepris un long voyage à Tahiti qui a marqué un tournant majeur dans sa création et a conduit à la naissance des papiers découpés.
Opéré à Lyon en janvier 1941, Matisse a frôlé la mort et a été surnommé « le miraculé ». Il connaissait donc intimement l'angoisse de la maladie, les douleurs insupportables et la fragilité de la vie. Il a trouvé du réconfort dans la création, comme en témoigne sa déclaration à Louis Aragon le 20 janvier 1943 : « Je suis très satisfait de moi-même : mon état de santé s'améliore. J'ai donc profité de cette pause dans mes tourments pour me consacrer à la peinture ».
Cette proximité avec la mort imminente a incité Matisse à déclarer : « Je me suis interdit de penser plus de quelques jours à l'avance et de me préoccuper du temps qui me restait à vivre ». Cette perspective a renforcé son désir de créer des papiers découpés, indépendamment des critiques négatives. Matisse souhaitait transmettre ce réconfort que lui procurait la création au public. Lorsque Montherlant lui a demandé : « Est-ce que votre œuvre et le souvenir de votre vie ne vous empêchaient pas de souffrir ? », il a répondu : « Oui, mais j'aurais voulu conclure ». Les papiers découpés lui ont offert l'occasion de le faire et ont conféré une dimension cathartique à ses œuvres, comme le soulignait Aragon : « L'optimisme de Matisse, c'est le cadeau qu'il a fait à notre monde malade… ».

Entre Art et parcours de vie, impliquant de côtoyer la maladie, et de faire évoluer son art avec elle, ce lien entre médecine et Art ne pouvait que trouver sa place dans la représentation des Hauts de France.

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Le musée Matisse du Cateau-Cambrésis ( wikipedia cc Velvet)

 Le musée Matisse du Cateau-Cambrésis ( wikipedia cc Velvet)