Démographie, formation et parcours professionnel des manipulateurs

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A l’image de l’ensemble des personnels de santé, depuis quelques années, la démographie des manipulateurs d’électroradiologie médicale (MEM) traverse une crise, affectant les effectifs dans toutes les disciplines et tous les secteurs, public comme privé.

A l’image de l’ensemble des personnels de santé, depuis quelques années, la démographie des manipulateurs d’électroradiologie médicale (MEM) traverse une crise, affectant les effectifs dans toutes les disciplines et tous les secteurs, public comme privé. Ce déficit est le résultat d’un effet ciseaux entre l’augmentation du nombre d’équipements et des besoins de santé qui ne cessent de croître alors que dans le même temps les effectifs s’érodent du fait des départs en retraite et du changement de métier des professionnels.

Augmentation des effectifs en formation
Le fichier ADELI  seul moyen officiel de suivi des professionnels montrait ses limites, efficace pour comptabiliser les intégrations de nouveaux professionnels, insuffisant pour le suivi et retrait des listes. Les centres de formations de manipulateurs d’électroradiologie médicale, tant DE que DTS, ont rapidement alerté leurs ministères de tutelles et les régions sur le sujet de la démographie. Le comité d’harmonisation, les associations dont l’AFPPE, ont sollicité des augmentations des effectifs autorisés, relayées depuis par les employeurs.
Ces demandes ont enfin été entendues. Depuis 3 ans davantage d’étudiants sont accueillis en première année, soit une hausse de 16% d’étudiants accueillis en 2022 par rapport à 2020, et 21% en 2023. A cela s’ajoutera l’ouverture envisagée de nouveaux centres, qui conduira en 2024 à + 35% en prenant en compte les 11 projets relativement stabilisés.

Diversification des voies de sélection
Avant même Parcoursup, les centres de formation DE & DTS recrutaient via APB , le recours aux oraux était largement abandonné, les concours grandement critiqués… L’harmonisation des sélections via Parcoursup, si elle est sujette à controverse, répond au postulat de diversification… Le candidat est maître du jeu, lui seul connaît ses préférences et priorisations. La construction de l’équation de sélection permet aux différents centres de décrire un profil dans le cadre d’attendus nationaux…
Des interrogations récurrentes apparaissent : l’impertinence de la sélection au regard des priorités des candidats, l’alignement des lycées et des sections, les délais de stabilisation des listes, la dispersion géographique. Considérations entraînant en corollaire : soupçon de non engagement des étudiants, augmentation des interruptions en cours de formation en lien avec le mode de sélection. Dans un contexte de grands changements sociologiques, ce lien de causalité est-il sûr et établi ? Des aménagements seront certes apaisants.  
Aujourd’hui, les constats bruts montrent une augmentation constante du nombre de candidats (+ de 30 000 candidats pour 1 814 places), mais une difficulté à remplir les sections (allongement des listes, procédures complémentaires), une orientation vers le recours aux entretiens de sélection (meilleure accroche des candidatures…).
Les arrêts ou interruptions en cours de formation se concentrent en 1ère année, moyenne relativement stable, oscillant de 13 à 17% des effectifs de L1 de 2019 à 2022 (4% en L2, 1% en L3), mais très inégale d’une promotion à l’autre (effets de groupe ?), d’un centre à l’autre (de 41% à 3%).
Parallèlement à Parcoursup, la voie de la formation professionnelle continue résiduelle il y a quelques années, reste, malgré sa progression, encore marginale (2,3%).
La voie de l’apprentissage, en revanche, s’installe rapidement : en 2022, 145 apprentis dans les DE & DTS, soit plus de 3% des effectifs. Si 43% des centres de formation étaient entrés dans la démarche en 2022, ce sont 82% qui affichent un projet engagé pour 2023 ou 2024.

Poursuite de scolarité
S’il est aujourd’hui difficile de connaître avec précision les changements de métiers des professionnels MEM (nombre, orientation, ancienneté…), l’appréciation en est faite à partir de la désertion des rangs… La mise en œuvre d’un registre partagé des professionnels de santé, facilitant le contact et le suivi des cohortes,  devient une incontournable nécessité….   
Les centres de formation, quant à eux, évaluent les ruptures immédiates, poursuites de scolarité de jeunes MEM qui dès la sortie de leurs études s’engagent ailleurs. Ce taux est de 5 à 8%, et si les causes méritent d’être affinées, celles qui reviennent sont l’approfondissement, la diplomation supérieure.
Entrées depuis les années 2010, dans la dynamique LMD, les professions de santé doivent déployer l’ensemble du dispositif pour conserver leur attractivité et s’attacher à maintenir dans le tissu professionnel et le milieu du soin ceux qui ont, à la fois, le besoin et les capacités de maximiser leurs compétences. Ces constats ont été largement éclairés par les différentes études, rapports IGAS, IGAENR , parlementaires. La réflexion est engagée pour un niveau complémentaire de Master.
Améliorer la démographie des MEM, c’est indéniablement aujourd’hui mobiliser les ressources pour former plus, mais aussi donner des perspectives d’évolution pour conserver l’engagement du plus grand nombre.

Et les cadres de santé MEM

Si le déficit actuel de MEM est prégnant, nous devons aussi nous préoccuper de la pénurie des cadres de santé. A la faiblesse démographique des MEM s’ajoute la désertion de l’engagement vers la carrière de cadre. Une enquête structurée devra éclairer cette situation : est-ce l’emploi et l’activité du cadre qui freinent les engagements ? ou est-ce une inadéquation des modalités de formation ? de diplomation, de salaire ? Toute profession s’appauvrit si elle ne manage pas son évolution, ne maîtrise pas la gestion de son environnement, son évolution, la structuration de ses rangs.
Cette voie de l’encadrement qui longtemps a été la seule véritable voie de promotion professionnelle…

(1) ADELI : Automatisation DEs Listes, répertoire national d’identification des professionnels de santé.
(2) APB : plate-forme Admission post-bac ouverte de 2002 à 2017.