L’écoresponsabilité en radiologie : un équilibre délicat entre éthique et qualité des soins

La question de l’écoresponsabilité en radiologie est devenue un enjeu majeur, comme en témoigne les discussions des Journées Francophones de Radiologie (JFR) 2021. Mais derrière cette prise de conscience, se cache un défi de taille : comment concilier les impératifs écologiques avec la nécessité de garantir des soins de qualité ? Cette question, qui soulève de nombreux débats éthiques, se pose dans plusieurs domaines clés de la pratique radiologique.

Réduction de la pollution numérique : une nécessité mais avec des défis éthiques

L’un des axes majeurs de l’écoresponsabilité en radiologie est la sobriété numérique, qui consiste à réduire l’empreinte carbone des équipements et des données générées par les actes d’imagerie. La gestion de l'énorme volume de données numériques, qui ne cesse de croître avec l'évolution technologique, est un défi majeur. Si cette réduction des données peut diminuer l'impact écologique, elle soulève des questions : Faut-il limiter le nombre d’images archivées ? Peut-on se permettre de ne conserver que les images essentielles, sans risquer de perdre des informations cruciales pour le diagnostic ou la prise en charge future du patient ? Le développement de protocoles pour une gestion plus écoresponsable des données pourrait également restreindre la liberté des radiologues dans leurs choix professionnels, une réflexion éthique importante à considérer.

Achats plus écoresponsables : entre coûts environnementaux et économiques

L’arbitrage entre le coût environnemental et économique est un autre défi central dans la démarche écoresponsable en radiologie. Par exemple, acheter des sets jetables moins chers et générant plus de déchets peut sembler une solution économique à court terme, mais pose la question du gaspillage et des coûts écologiques à long terme. À l'inverse, acheter en quantité plus limitée et éviter le gaspillage revient à un coût plus élevé, ce qui peut créer des tensions entre les impératifs économiques et environnementaux. L’intégration de critères écoresponsables dans les processus d’achat, comme les matériaux d'emballage ou la provenance des produits, doit être réfléchie pour concilier qualité des soins, coûts et impact environnemental.

Téléradiologie : moins de CO2, mais à quel prix pour la qualité des soins ?

L'essor de la téléradiologie, qui permet d’envoyer des images à distance pour un diagnostic à distance, est une alternative qui pourrait réduire l’empreinte carbone, notamment en limitant les déplacements des patients et des radiologues. Cependant, cette pratique soulève de nombreuses questions éthiques. Si la téléradiologie peut réduire les inégalités d'accès aux soins, elle prive les patients de la consultation en personne, où le radiologue peut expliquer les résultats et leur impact. Le cadre d’utilisation de la téléradiologie doit donc être bien défini pour ne pas compromettre la qualité du soin. De plus, l’usage de techniques plus invasives pour compenser l’absence de certaines pratiques locales soulève également la question de l’éthique : faut-il privilégier le transport du patient, avec son impact écologique, plutôt que de recourir à des solutions plus invasives disponibles localement ?

Produits performants, mais risqués pour la santé et l’environnement

Enfin, l’utilisation de certains produits en radiologie soulève une problématique importante d’écoresponsabilité. Les produits injectés à visée diagnostique, comme le gadolinium, ou ceux utilisés dans le cadre de traitements, comme les stents et les microparticules d’embolisation, ont permis de grandes avancées dans les soins des patients. Cependant, leur impact environnemental et leurs risques potentiels pour la santé humaine, notamment sur la flore et la faune, ne sont pas toujours bien évalués. Cette question, qui touche également les risques biologiques et génétiques de certains produits, soulève des interrogations éthiques sur les bénéfices apportés par ces produits et leurs effets secondaires. Les radiologues doivent mener une réflexion continue pour équilibrer l’efficacité des soins et la gestion des risques environnementaux et sanitaires.

L’écoresponsabilité en radiologie n’est donc pas une simple tendance, mais bien une nécessité pour répondre aux enjeux climatiques actuels. Cependant, cette transition doit se faire en toute conscience des dilemmes éthiques qu’elle engendre, afin de garantir à la fois la qualité des soins et un avenir plus durable pour le secteur.